Exposition

 

François-Xavier Bouchart, aujourd’hui décédé, est un des rares, avec Henri Guérard, a avoir photographié le vieux quartier de Belleville jusqu’à la Place des Fêtes, en particulier certaines rues et passages : le passage des Faucheux, Kuzner, la rue Vincent etc. Certains lieux ont aujourd’hui complètement disparu, laissant place à de grands ensembles, notamment dans la partie du 19ème de la rue de Belleville.

 

Dans la continuité de Doisneaux, Ronis ou Perec, Bouchart réalise un travail photographique sur Belleville dans les années 1970, à cette époque en pleine destruction. Mais son regard sur ce quartier est personnel. Il veut photographier les mêmes lieux, mais en phase de mutation extrême. Et poursuivre cet inventaire qu’avait également mené Georges Perec pour son documentaire En remontant la rue Vilin et imprimer sur ces clichés les restes d’un Paris populaire démoli.

 

Pour lui, l’urgence est de traduire cette rupture des années 1970 quand il en est encore temps. Et de montrer la vie quotidienne des populations qui y vivent malgré les destructions, ou les enfants qui jouent dans les terrains vagues. Ces excursions dans Belleville constituent des promenades photographiques personnelles. Les paysages architecturaux et sociaux qu’il va photographier lui racontent une histoire différente. Les effets de lumière quand le soleil affleure les différentes matières qui composent ces rues de Belleville deviennent des objets esthétiques et d’émotions. Les superpositions des strates du quartier sont également des superpositions de mémoires des habitants. En cela, il témoigne des transformations qu’un quartier populaire et multiculturel subit dans sa chair, son identité et son ambiance.

 

Cette exposition se compose de 70 photographies réparties en sept thématiques qui proposent un cheminement dans le travail de Bouchart sur Belleville : Lumières de Belleville, Scènes de vie quotidienne, Devantures et commerces, Passages et ruelles, les Mots et affiches, Enfance, Destruction.

 

Les droits sur ces photos appartiennent à sa compagne, Nadine Bouchart, qui a autorisé l’association Trajectoires à produire cette exposition sur le basculement d’un des derniers villages dans Paris. Une rétrospective de cette œuvre photographique devrait tout naturellement trouver cette année un lieu d’accueil dans Belleville pour permettre aux habitants de retrouver ce quartier comme peut-être ils ne l’ont jamais connu.

 


 

Francois-Xavier Bouchart, photographe du Paris populaire

 

Par Nadine Beauthéac Bouchart

 

Francois-Xavier Bouchart est né en 1946 à Bordeaux dans une famille originaire du nord de la France (père) et d’Alsace (mère). Dès son jeune âge, il s’amuse à produire des petites bandes dessinées, des jeux car les matières classiques de l’école l’ennuient. A 13 ans, il reçoit en cadeau un appareil photographique qui tout de suite le fascine. Pendant les vacances, il fait son premier reportage sur tous les ponts de Paris, chaperonné par sa mère qui refuse de le laisser seul dans Paris où la famille vient d’emménager. De ce travail d’adolescent, il garde le goût des dossiers photographiques par thématique. L’architecture, la rue, le paysage l’attirent plus particulièrement. Il intègre l’école Penninghen où il prépare divers concours artistiques, puis l’Ecole des métiers d’art qu’il réussit brillamment.

 

Découverte enthousiaste de Belleville

 

Une rupture familiale suscite son intérêt pour Belleville. Ses parents se séparent et le père installe la famille rue Rampal, moins chère que la rue de Suffren où ils avaient vécu plusieurs années. Pour François-Xavier, loin d’un « déclassement » social, c’est une heureuse découverte. Combien de fois m’a-t-il raconté comment les petites maisons, leurs jardinets, la vie sociale chaleureuse du quartier l’avaient rempli de bonheur, loin des rues du 16 ème arrondissement, vides et ternes le week end ! Pendant son service militaire comme graphiste à la Revue historique des armées, dès 18 heures il profite de la lumière et arpente les rues de Belleville qu’il photographie. Il continue les années suivantes alors qu’il est employé au Barved Zumizion, groupe de travail sur les techniques audio-visuelles. Il privilégie la couleur au noir et blanc bien qu’utilisant les deux options. Il se sent de son époque, celle où les photographes adopte la couleur compte tenu de l’amélioration des procédés de tirage. Un message aux urbanistes Son travail va être remarqué par François Mathey, conservateur du Musée des Arts décoratifs, et par François Barré, jeune directeur du centre de Création industrielle au Centre Georges Pompidou en chantier. Ces deux figures du monde culturel français choisissent 300 photos de Bouchart à projeter en audio-visuel en contrepoint de l’exposition Design français en 1971 au Musée des Arts décoratifs. Dans le catalogue de l’exposition, François-Xavier commente son travail :

 

« De cette couronne villageoise qui entourait Paris au XIXème siècle : Belleville, Ménilmontant, Montparnasse, Passy, Montmartre, il ne reste que quelques îlots qu’une politique de spéculation détruit de jour en jour. J’ai été naturellement touché par la chaleur humaine qui circule dans ce cadre presque rural. Les rues, les enseignes, les couleurs, les regards, les silhouettes m’ont ému. Il m’apparut impossible de ne pas prolonger le souvenir d’un passé si présent. Il m’apparut nécessaire que ce témoignage soit surtout un message aux urbanistes et à ceux qui leur donnent le feu vert. »

 

Peu après, Bouchart devient photographe au Centre de création industrielle du Centre Georges Pompidou, où il travaille sur « les grandes expositions du 5ème étage » sur des thèmes comme Bistrots, cafés et cie, Architectures des gares, La ville et l’enfant etc. Il suit ensuite François Barré au Parc de la Villette où Françoise Morier réalise en 1992 l’exposition Belleville-Belleville qui intègre des photos de François-Xavier :

 

« Contrairement à ce qu’a exprimé Willy Ronis, j’avais la vision que Belleville était en train d’être démoli et qu’il y avait des photos à faire en urgence pour traduire cette rupture des années soixante-dix. (…) J’ai connu la fin du monde de Clément Lépidis. »


  Le photographe reçoit une bourse de la Fondation de la vocation pour un travail de longue haleine sur les lieux de Marcel Proust. Il est lauréat du Prix Kodak de la Critique photographique en 1982. Il publie de nombreux ouvrages, dont sur Proust, les gares en Europe, l’habitat social des HLM… En 1992, la maladie l’oblige à s’arrêter et il meurt d’un mélanome quelques mois plus tard en 1993 à l’âge de 47 ans. Sauvegarder et diffuser ses photographies Dans les années qui suivent, je me suis employée en tant qu’épouse ayant suivi ses ses reportages à faire rééditer ou à publier quelques uns de ses travaux. Trente de ses photos proustiennes noir et blanc, en format panoramique, ont été acquises par la Bibliothèque nationale de France à l’occasion de la grande rétrospective sur cet auteur en 1999 - 2000. Je suis reconnaissante à Mamoud Benahmed et à l’association Trajectoires d’avoir exhumé des étagères de la photothèque de François-Xavier que je préserve ce travail qui représente un maillon exceptionnel dans l’histoire photographique de Belleville.

 

 

 

Contact 

Mamoud BENAHMED

Tél : 01 44 64 40 68

Fax : 01 44 64 40 63

Portable : 06 73 48 61 63

 

Association Trajectoires

Mohammed Ouaddane 

tél : 06 11 29 59 18